Le Garçon girafe / Lecture

 

LE GARÇON GIRAFE / Lecture publique 

Le 1er octobre 2013 - Théâtre du Rond Point

 

 

Texte / Christophe Pellet


Direction / Anne Théron

Collaboration artistique / Daisy Body

 

Avec / Liza Blanchard, Marie-Laure Crochant, Logan De Carvalho, Jonathan Genet, Baptiste Guiton, Stanislas Nordey, Mélodie Richard

 


Captation & montage vidéo / Nicolas Comte


L’AUTEUR

Christophe Pellet est un auteur essentiel de la littérature contemporaine. Son œuvre, déjà importante, publiée à l’Arche, décline les nouveaux comportements qu’induit un changement de civilisation. Dans ses pièces, les repères se brouillent, que ce soit les genres, les sexes et les valeurs. Son écriture propose aussi bien des séquences de films, des bouts de littérature, que des enchaînements de courtes nouvelles, et pourtant le tout offre un pur moment de théâtre.

Non seulement la langue est superbe, mais Christophe Pellet appartient à ces auteurs fous de théâtre qui le déconstruisent, voire le fracassent, pour mieux l’interroger.

 

LE GARCON GIRAFE 

L’action du Garçon Girafe se déroule sur plusieurs décennies, en un étrange triptyque qui varie les lieux et les temporalités.

Portraits de quelques garçons et filles, on pense à Rimbaud, à Christophe Honoré ou aux années pop. Or, il s’agit bien de notre époque, dans son infinie nostalgie de la perte, inconscient collectif d’une fin annoncée à laquelle les femmes résistent tandis que la plupart des hommes sombrent.

Cela débute tel un soap opéra, conversations entre jeunes hommes qui ont peur de vieillir et testent des crèmes de beauté, puis couchaillent sans vrai désir. Et puis tout dérape parce qu’il y a la vie, le besoin d’argent, le besoin d’amour, et ceux qui ne résistent pas à l’épreuve du réel. Dérapage qui conduit à la disparition ou au meurtre car il faut bien que la rage s’exprime, tandis qu’un enfant naît à l’insu du père emprisonné. Plus tard encore, l’enfant a grandi, il a été élevé par des femmes, mais il incarne à lui seul l’échec d’un monde. Et les séparations continuent, et la mort réapparaît.

 

L’EROTISME

Pas de scènes de sexe à proprement parler dans ce texte qui diffuse pourtant un érotisme constant, ne serait-ce que par la confusion des genres et la transgression potentielle qu’amène une bisexualité latente.

Si l’amour semble impossible, les corps tentent le rapprochement, se frôlent, s’esquivent, parfois s’étreignent enfin, mais sans parvenir à écrire une histoire.

Un érotisme attisé par l’inassouvissement qui conduit à changer de partenaires sans pour autant trouver le repos.

 

LA FICTION

A la lecture de cette pièce, on est saisi par un sentiment de pure fiction. Trop de réalité tue la réalité. La réussite professionnelle de Nathalie frise la caricature, aussi bien que l’échec social et sentimental de la plupart des hommes. La dramaturgie brouille les repères, autant de temps que d’espace, et questionne l’écriture de plateau. Car mettre en scène une telle pièce relève du pari. Comment représenter la désolation, l’expérience finalement commune à tous ces personnages de non appartenance au monde ? Comment fouiller le texte dans ses plis et ses replis et faire entendre son impossibilité de dire, ou pour l’énoncer autrement comment représenter l’incapacité des protagonistes à nommer ce qui les empêche « d’être » ? Nils, le fils de Nathalie et de Julien, dans son refus de se nourrir représente le point d’acmé de cette impossibilité à vivre dans un monde où il ne trouve pas sa place.

Fiction également, car nous ne sommes pas face à des scènes dont l’enchaînement construirait une histoire, mais plutôt soumis aux fragments/flash d’une épopée. Les dialogues n’appartiennent pas à l’oralité, ils relèvent de la littérature. L’ensemble ressemble à un tableau qui exigerait un certain recul pour son appréhension.

Et plus le récit avance, plus nous sommes bousculés d’un point de vue à l’autre, perdus entre les ellipses et les répétitions. Comme si les séquences relevaient plus de la projection mentale des personnages que de leur véritable vécu.

Très vite, on ne sait plus ce qui appartient à la réalité.

Le tout suggère donc une logique de la sensation plutôt que de la narration. S’il y a quand même une histoire – digne d’un feuilleton -, celle-ci est le prétexte à la fouille obstinée des soubassements de la conscience et du territoire dans lequel elle se constitue, évolue et meurt. En fait, Le Garçon Girafe raconte une fin du monde.

Anne Théron


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